Je pense qu'en matière d'OGM, nous avons perdu assez de temps. Il nous faut sortir de l’impasse dans laquelle l’Europe s’est engagée en décrétant en 1999, un moratoire sur les OGM. Nous avons le devoir de déterminer si les OGM présentent un risque ou sont un progrès pour la santé humaine et l’environnement.
Alors que des pays comme les USA, l’Argentine, le Brésil, la Chine, autorisent la culture des OGM sur le principe de l'absence de preuve de danger, la France et l’Europe adoptent une position opposée : pas d'utilisation d'OGM tant que l'innocuité de ceux-ci n'a pas été prouvée.
Dès lors, je m’interroge : pourquoi remettre à plus tard le débat sur les OGM ? Pourquoi l’Europe aurait-elle raison face au reste de la planète ?
Ne serions-nous pas en train d’affaiblir l’agriculture française face à la concurrence mondiale, de condamner l’agriculture européenne au nom d’une forme d’obscurantisme.
Sans dire « oui au progrès » d’une manière béate, plus de dix années de pratique dans des grands pays agricoles semblent nous apprendre que les risques supposés ne résistent pas aux avantages économiques et environnementaux constatés.
Un constat qui nous renvoie à la promesse d’origine de la recherche sur les organismes génétiquement modifiés qui consiste à intervenir sur l’ADN d’un organisme pour donner à une plante des propriétés nouvelles pour qu’elle produise plus, qu’elle ait besoin de moins d’eau, qu’elle se protège des parasites, qu’elle se conserve mieux, qu’elle ait meilleur goût, qu’elle supporte mieux le froid... Les bénéfices attendus laissent rêveur : réduire l’utilisation des insecticides, herbicides et engrais, développer des variétés adaptées aux conditions climatiques des pays d’Afrique dévastés par les criquets, faire pousser des cultures sur des sols arides…Sans compter la recherche sur les alicaments.
Je conçois que les cultures transgéniques puisse effrayer certains, néanmoins, nous devons avoir confiance en l'avenir et combattre ensemble nos peurs. Chacun doit pouvoir exprimer son point de vue dans le respect des libertés d’autrui. Les affrontements d’aujourd’hui doivent laisser place au discours de la raison. Nous devons renouer la voie du dialogue afin que tous puissent s’exprimer sans crispation.
Ce débat démocratique concerne tous les acteurs de la société car il se trouve au carrefour des enjeux du monde moderne :
L’enjeu environnemental
Au-delà des polémiques : dissémination, rendement accru, biodiversité… il est un bénéfice direct avéré des OGM : ils permettent à la plante de résister à la maladie et aux parasites sans qu’un recours systématique aux produits phytosanitaires ne soit nécessaire.
L’enjeu économique
Le moratoire européen sur les OGM décrété en 1999 a eu pour effet de freiner la dynamique de recherche sur le vieux continent. Conséquence directe : les grands semenciers américains ont depuis pris une avance considérable, tant au niveau de la recherche que de la production et de la commercialisation des semences OGM. Une hégémonie qui risque d’entraîner à terme une dépendance des agriculteurs européens.
L’enjeu éthique
La science a franchi une nouvelle frontière, celle de la manipulation du gène. Les biotechnologies humaines, végétales ou animales font peur car elles touchent au cœur du vivant et donc sont investies d’un caractère sacré. On ne touche pas à ce que la nature ou dieu a créé.
L’enjeu politique
La grande majorité des hommes politiques observe un retrait prudent face au caractère excessif du débat sur les OGM. Ils sont peu à prendre position sur le sujet et à risquer le désaveu de l’opinion publique. Un vide médiatique exploité par les anti-OGM, là ou peu de pédagogie de la part de nos élus permettrait de faire avancer la prise de décisions.
L’enjeu médiatique
Par le biais des arrachages illégaux, les anti-OGM ont réussi leur pari d’attirer l’attention des média et de profiter de cette tribune pour délivrer leurs messages. Le résultat est là, sans que le débat ait eu lieu, les français sont majoritairement méfiants face aux OGM.
Il me semble pourtant que dans un pays démocratique l'état à le devoir de protéger le patrimoine privé et ceux qui s’inscrivent dans le respect scrupuleux des règles.
On le voit, il est difficile de circonscrire le débat à une seule approche d’experts scientifiques validé par le pouvoir politique. Les clivages opposant pro ou anti OGM trouvent leurs fondements dans leurs idéologies respectives.
Ce qui justifie les positions des protagonistes, ce n’est pas tant le fait d’être pro ou anti OGM, mais bien plus leur appartenance à une idéologie se réclamant de visions totalement opposées quant à l’avenir de la planète. Au travers du débat sur les OGM, c’est l’opposition frontale de modèles de développement de la planète qui s’exprime. Pour faire court, d’un côté les militants de la cause altermondialiste et de l’autre les représentants du capitalisme mondial. Les uns accusant les autres de vouloir breveter le vivant pour le vendre et de vouloir soumettre les paysans du monde à la dépendance de quelques sociétés de semences internationales. Cet affrontement aussi caricatural soit-il, est symptomatique de la peur du risque qui gouverne nos sociétés occidentales. Nous nous retranchons derrière un « super principe de précaution » et autres moratoires qui conduisent à un immobilisme directement préjudiciable au monde agricole. En effet, il ne faut pas oublier que les premiers concernés ce sont les agriculteurs…Et vraisemblablement les seuls à qui personne n’a demandé l’avis !
Pour sortir de l’impasse il est nécessaire que chacun prenne ses responsabilités :
Aux politiques, l’engagement de mandater un programme d’études permettant enfin de trancher et de valider ou pas la production de végétaux OGM en France et en Europe.
Aux scientifiques de nous dire en toute objectivité, si les OGM présentent des risques ou au contraire s’ils sont un progrès pour la santé humaine et l’environnement.
Aux industriels de l’agroalimentaire, le courage de ne pas banaliser le discours anti-OGM auprès du grand public.
Et enfin aux consommateurs, la curiosité d’écouter le discours de la raison, c'est-à-dire faire acte de pédagogie pour prendre position sur les OGM en toute indépendance d’esprit.
La France ne pourra faire l’économie d’un véritable débat démocratique sur les OGM et je gage qu’à force de pédagogie des décisions seront prisent. Néanmoins, il y a urgence car le réalisme économique des marchés agricoles n’a pas attendu la fin du moratoire européen pour développer 90 millions d’hectares à travers le monde. Enfin, il me semble juste que la démocratie offre à chacun le soin de choisir s’il est pro ou anti-OGM et s’il souhaite cultiver ou non des organismes génétiquement modifiés.
Des prises d’initiatives sont nécessaires pour enfin offrir à l’agriculture le projet d’avenir qu’elle mérite.
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